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Le harcèlement sexuel, encore trop présent sur le lieu de travail

Une définition du harcèlement sexuel et du sexisme

Le harcèlement sexuel sur le lieu de travail renvoie à tout comportement à caractère sexuel ou fondé sur l’appartenance à un sexe qui n’est pas souhaité par une personne et qui porte atteinte à sa dignité. À titre d’exemple, le harcèlement sexuel au travail peut par exemple se manifester par des remarques embarrassantes sur l’apparence physique de collègues; de remarques sexistes ou de plaisanteries sur les caractéristiques sexuelles, le comportement sexuel ou l’orientation sexuelle de collègues; de contacts physiques non désirés, de regards ou gestes allusifs, etc.

Le sexisme quant à lui renvoie à tout type de discrimination en raison du sexe. En d’autres mots, sont considérées comme du sexisme les moqueries sur une personne en raison de son apparence physique, de son comportement en lien avec son appartenance à un sexe ou de son orientation sexuelle ou encore les remarques embarrassantes liées au fait d’être une femme ou un homme sont des comportements sexistes.

En Suisse, ces comportements sont interdits par le code des obligations[1], mais également par la loi sur le travail[2] et la loi sur l’égalité[3]. Nombreux sont des entreprises et écoles qui ont adopté des circulaires/règlements internes pour combattre le harcèlement sexuel et le sexisme, car il en va de l’obligation de l’employeur de prévenir les comportements répréhensibles au sein de sa société. Selon le secteur d’activité, le risque de harcèlement sexuel et/ou de sexisme est plus au moins accru. En effet, une enquête menée en 2008 démontrait que les branches dans lesquelles ces comportements ont tendance à se manifester à une fréquence supérieure à la moyenne pour les deux sexes sont l’édition/ impression, l’hôtellerie/la restauration, les industries alimentaires et l’industrie chimique.[4]

 

Malgré les instruments légaux censurant ces comportements, la sensibilisation et la prévention, nombreux sont encore celles et ceux qui sont victimes de harcèlement sexuel ou de sexisme au travail. Que cela soit l’acte d’un collègue ou supérieur hiérarchique, partenaire d’affaires, client ou autre, le harcèlement sexuel et le sexisme sont des réalités, et ce partout. Récemment encore, la journaliste Patrizia Laeri racontait comment un collaborateur de la SRF l’aurait harcelée et le collaborateur en question serait toujours en poste dans une fonction hiérarchique.[5]

 

Quelques chiffres sur le harcèlement sexuel

Si l’on se tourne du côté des chiffres de la statistique policière de la criminalité, il s’avère qu’en 2020, pas moins de 1435 cas de harcèlement sexuel et 1477 victimes ont été enregistrés. Dans 9 cas sur 10, la victime était une femme et la tranche d’âge des 18 à 29 ans présentait le risque le plus élevé. » Pour 30 % des victimes, l’infraction est malheureusement restée non élucidée. Au niveau professionnel, il s’avère que dans seulement environ 5 %, la personne prévenue était issue d’une relation professionnelle.

 

De plus, plus de 95 % des personnes prévenues étaient des hommes, avec une large représentation du groupe d’âge des 18 à 39 ans », ce qui signifie « que les femmes représentent 90 % des victimes alors que 95 % des personnes prévenues sont des hommes.». En outre, les sondages réalisés auprès de la population montrent que le taux de dénonciation rapporté en cas de harcèlement sexuel ne dépasse même pas les 10 %.[6]

Par conséquent, les chiffres de la police criminelle ne représentent que la pointe de l’iceberg, car comme la journaliste Patrizia Laeri, la plupart des victimes ne parlent pas tout de suite ou gardent tout simplement le silence. L’on pourrait se demander pourquoi les victimes de harcèlement sexuel, tout comme celles et ceux de viol, choisissent la plupart du temps de ne pas divulguer les faits.

Pourquoi garder le silence?

En octobre 2020, le journal Le Temps s’était intéressé à cette question et avait avancé dans son article quelques explications pouvant permettre de répondre à cette question. Lesdites raisons peuvent être résumées comme suit :[7]

 

  • La peur de ne pas être cru, car les faits sont généralement difficiles à prouver
  • Les motivations des victimes sont remises en doute (véracité des faits, exagération des faits, désir de vengeance, etc.)
  • La responsabilité ou plutôt la culpabilisation de la victime, qui se demande si elle ou il n’aurait pas d’une quelconque manière incité ce comportement.
  • La crainte des représailles, que cela soit du harceleur lui-même ou même d’autres employé-e-s de la société

Il peut être également rajouté la crainte que cela n’aboutisse pas au résultat attendu, c’est-à-dire que rien ne change et que les faits continuent, voir que la situation empire. Il ressort en effet de l’étude précitée qu« il serait également rare que des mesures juridiques soient prises contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, ou alors, souvent, elles le sont seulement une fois que le harcèlement sexuel est devenu trop important, qu’un signal d’arrêt clair doit être envoyé ou lorsque les personnes concernées sont déjà en congé maladie ou ont démissionné ».

 

Il est désolant de penser que l’employeur n’agira pas avant que les victimes ne soient en arrêt maladie ou encore hors de l’entreprise. Le fait même que ce genre de comportement survienne au sein de l’entreprise est une preuve que la phase prévention/sensibilisation sur ce sujet a échoué ou encore est inexistant dans l’entreprise.

Parler ou se taire, ce n’est pas une décision aisée

Décider de dénoncer ces faits n’est pas une décision anodine. Il est de la responsabilité des employeurs non seulement d’adopter des règles internes condamnant strictement ce genre de comportement, mais également de s’assurer de sensibiliser leurs employé-e-s sur ces questions. De plus, à supposer que la phase de prévention n’ait pas empêché le harcèlement sexuel ou sexisme, des canaux de communication doivent exister en entreprise permettant aux victimes ou simples témoins des faits de les signaler.

Après avoir reçu un tel signalement, il est alors de la responsabilité de l’employeur de ne pas ignorer le cas ou encore le traiter avec légèreté comme cela est malheureusement parfois le cas. La légèreté ou encore l’inaction face aux propos des victimes ayant pris le courage d’exposer les faits conduiront à un climat de travail hostile et parfois soit à la démission de la victime ou encore à une absence de longue durée. Raison pour laquelle, au sein de l’entreprise, la procédure à suivre après la réception d’un signalement doit être clairement établie, suivie et contrôlée.

 

Nul-le ne devrait subir de discrimination en raison de son sexe ou encore être victime de comportement répréhensible portant atteinte à son honneur et à sa personnalité. Le lieu de travail ne devrait pas devenir le terrain d’actes ou comportements illégaux.